L’historien de l’art Michel Poivert dévoile le visage de la photographie contemporaine hexagonale, rassemblant trois générations de photographes en 250 images.
Textuel, 416 p., 59 €
Ce livre est né d’un constat : aucun ouvrage ne permettait de manière synthétique de se faire une idée de la photographie en France depuis un demi-siècle. L’imaginaire photographique français au tournant des années 1970 est marqué par une double rupture : la France des Trente Glorieuses, celle qui a inspiré au courant humaniste ses plus beaux clichés est en pleine mutation.
Le photojournalisme à la française est arrivé au bout d’une certaine mythologie : la figure héroïque du photoreporter, caméra au poing, perd du terrain. Les temps de crise nécessitent et suscitent de nouveaux regards : de quoi sont-ils faits ? Michel Poivert tente d’y répondre avec cette somme qui n’est ni une anthologie ni une histoire de mouvements artistiques et encore moins un catalogue des différentes pratiques. Le livre s’articule autour de huit axes forts, à même de rendre compte, dans leur dynamique historique, des différentes approches qui font la photographie d’aujourd’hui.
Huit chapitres indépendants que l’on peut lire dans le désordre, chacun étant complété par un portfolio d’une trentaine d’images d’autant de photographes emblématiques de la thématique choisie : le renouvellement du reportage, les récits du paysage, le témoignage social, le collectif, l’influence des intellectuels, des critiques ou chercheurs, ou bien encore le rôle de l’État et du soutien à la création.
Saluons l’intérêt de ce bel ouvrage qui nous permet d’apprécier l’existence manifeste d’une scène française dont la diversité et l’ampleur ne répondent à aucune esthétique clairement identifiable.
Si cette créativité kaléidoscopique est une des raisons de son manque de visibilité sur le marché de l’art, c’est également ce qui fait sa liberté.
Puisse ce travail contribuer à faire sortir de l’ombre des dizaines de photographes et inciter les collectionneurs et amateurs de photographies, de plus en plus nombreux en France, à aller à la rencontre de ces talents.
Isabelle de Lagasnerie, La Croix, 19/3/2020